lundi 31 mars 2025

Chapitre 6 Maxime (José 2024)

- Bonjour ! Vous êtes seul, Maxence ? Maxime n’est pas là ?

- Bonjour ! Non, il est parti avec Argos.

- Vous vous habituez bien ici ? Votre nouveau travail vous plaît ? demande Juliette.

- Oui, parfaitement. Maxime m’est d’une aide précieuse grâce à sa longue expérience et la liste de ses contacts.

- Cela fait combien de temps que vous travaillez avec lui ? Trois mois ?

- Cela en fera quatre dans une semaine. ? Le temps passe vite.

- Comment êtes-vous arrivé ici, Maxence ? Je suis peut-être un peu indiscrète mais je n’ai pas beaucoup vu Maxime ces derniers temps. J’ai l’impression qu’il m’évite.

- En fait j’étais depuis longtemps un de ses clients et, quand il a proposé ses conférences et ateliers, je m’y suis inscrit. Depuis toujours je suis féru de littérature. Au fil de nos échanges, j’ai appris qu’il souhaitait remettre sa bouquinerie. J’étais alors cadre dans une société d’investissement. Arrivé à un peu plus de quarante ans, j’avais l’impression d’avoir épuisé tout l’attrait de la profession et je ne pouvais plus espérer de grands avancements. De plus, la société venait d’être rachetée par un consortium financier et des restructurations devaient avoir lieu. J’en ai profité pour négocier mon départ dans de bonnes conditions financières et, comme je venais également d’hériter d’une grosse somme d’argent, je n’avais plus de soucis pour l’avenir. Dans quelques jours, Maxime et moi acterons, chez son notaire, la vente du commerce. Il s’est proposé de rester à mes côtés encore six mois environ pour faciliter la transition et sans doute aussi pour qu’il puisse s’habituer progressivement à sa nouvelle vie.

- En effet, ce sera un grand changement pour lui. Je me demande ce qu’il compte faire par la suite. Je ne le vois pas rester inactif. Au fait, vous comptez apporter des modifications à la boutique ?

- Non, pas de grands changements. J’y imprimerai mon style bien sûr mais je garderai ce qui en fait le charme et qui est dû à son propriétaire actuel. Je ne sais pas si Maxime voudra récupérer le miroir à parecloses que je trouve sinistre. Il n’est pas trop piqué pour un au mercure mais il reste éternellement terne et paraît sale. Ça ne va pas ici. Lui, il disparaîtra.

- Tiens, voilà justement notre ami. Bonjour Maxime !

- Bonjour !

- Où est Argos ?

- Au pays de la jeunesse éternelle où le soleil brille et où tout est en fleurs. Il a été euthanasié tout à l’heure. On oublie que nos fidèles compagnons vivent moins longtemps que nous.

- Oh, je suis désolée !

- Pourquoi l’être ? Il a bien vécu. Il a été heureux et son heure était venue. Nul n’y échappe.

- Je ne te reconnais pas par moment. Tu n’es pas si dur habituellement. Et je ne te vois plus beaucoup. Je croirais presque que tu me fuis.

- Rien de spécial pendant mon absence, Maxence ?

- Non, c’est très calme.

- Tu dois être rassuré, Maxime, d’avoir enfin trouvé un repreneur.

- Je le suis surtout par le fait que Maxence est, presqu’autant que moi, amoureux des livres. Avec lui, la boutique sera en de bonnes mains.

- Je vais faire en sorte que cet endroit vive encore longtemps et qu’il soit encore plus connu.

- Super ! Je vous laisse. Je papote mais le temps passe. Je dois acheter de nouveaux articles de papeterie pour renouveler mon fonds de commerce. À bientôt !

- À bientôt, Juliette ! répondent en chœur les deux hommes.

mardi 11 mars 2025

Chapitre 5 Maxime (José 2024)

- Bonjour, Maxime. Assieds-toi.

- Bonjour, Louis.

- Ton dernier bilan ne me plaît qu’à moitié. Tu réagis au traitement mais l’évolution positive est très lente. Comment te sens-tu, Maxime ?

- Très fatigué. C’est long ! Je n’ai pas de nausée et grâce au casque réfrigérant qu’on me met à l’hôpital, lors des séances de rayons, je ne perds pas trop de cheveux.

- C’est le médecin et pas l’ami qui te parle. Il va falloir penser à lever le pied. Ta boutique te fatigue physiquement mais surtout nerveusement. Je comprends parfaitement tout ce que tu traverses et ressens.

- Louis, ce qui me tracasse le plus c’est de savoir jusqu’à quand je serai capable de mener la même vie. Je ne veux ni voir des regards attristés ni entendre des paroles compatissantes. Cette foutue tumeur ne gagnera que lorsque je serai à bout.

- Je sais que tu attends de moi de la franchise. Ta tumeur est inopérable, on te l’a dit. Là où elle est située, dans ton cerveau, on ne pourrait l’extraire sans toucher des zones essentielles, avec des conséquences irréversibles. Elle grossit, moins vite, mais elle grossit. Tant qu’elle ne comprime pas trop une zone sensorielle, tout semble aller bien, ou presque. Mais tu dois prendre tes dispositions. Pourras-tu recevoir de l’aide et du soutien de proches ? Juliette est une belle personne qui t’apprécie beaucoup, je crois, et n’est pas insensible à ton charme.

- Qu’ai-je à lui offrir si ce n’est un corps déglingué et un avenir à court terme ? Son amitié me suffit et, comme je l’ai dit, je ne veux pas de sa compassion. Ce qui me hante c’est l’avenir de la librairie. Je n’ose l’imaginer laissée à l’abandon. Tous les trésors qu’elle contient ne peuvent être éparpillés au hasard. Je voudrais tant transmettre tour cela à quelqu’un ! Mais personne ne semble intéressé. Les jeunes préfèrent les e-books à mes bons vieux amis.

- Il n’empêche que je te conseille vivement de réduire tes horaires d’ouverture. La fatigue que tu ressens est autant due au traitement de la chimio et de la radiothérapie qu’au fait que ton corps s’use. Ton cœur n’est plus celui de tes vingt ans. Le dernier électrocardiogramme montre des phases d’irrégularité. Tu dois le ménager !

- Tu n’as rien de mieux à me dire ?

- Si et c’est maintenant l’ami qui te parle. Tu n’es pas tout seul. Tu peux compter sur moi. Que dirais-tu de passer une quinzaine de jours avec ma femme et moi dans notre maison de la Côte d’Opale, fin juillet ou début août Bon, je vois ton regard. Quinze jours loin de ta boutique c’est trop. Et bien viens au moins une semaine. Sache que c’est une prescription et que c’est le médecin qui la préconise. Ah, tu souris ! Cela me fait plaisir. Et puis Argos pourra courir à sa guise.

- Tu sais, Argos commence à se faire vieux, comme moi. Il ne voit plus très bien et a parfois des crises d’arthrose. Si je ne trouve personne pour s’occuper de lui lorsqu’il le faudra, le vétérinaire l’euthanasiera. Argos est, comme moi, un vieux loup solitaire. Nous nous sommes habitués l’un à l’autre mais nous sommes trop vieux pour refaire notre vie avec quelqu’un.

- Bon pas de doute, ton moral n’est vraiment pas bon. Tu ne cesses de dire « vieux ». Je ne vais pas te prescrire un anti-dépresseur mais tu prendras quand même un léger anxiolytique.  Tu dors bien ?

- J’ai régulièrement des insomnies.

- Je te prescris également de la mélatonine. Cela t’aidera à t’endormir et améliorera la qualité de ton sommeil. Ce qu’il te faut aussi, même si c’est pour toi parfois difficile, c’est sortir, fréquenter des gens. Tu devrais te confier à Juliette mais je sais que tu ne le feras pas. Tu ne penses pas qu’en tant qu’amie elle a le droit de connaître ton état de santé ?

- Merci Louis. Je vais penser à ta proposition pour les vacances. C’est très gentil. On verra.

- N’hésite pas à venir au cabinet ou à m’appeler à n’importe quel moment.

- Bonne journée, Louis. Je ne te retiens pas plus longtemps car ta salle d’attente est pleine et tes patients vont s’impatienter, ce qui serait un comble.

- Je te retrouve bien là. Tu n’as pas perdu l’amour des mots. Au revoir, Maxime.

Chaque vie est un roman (José 2024-2025)

  Chaque vie est un roman .   Introduction Lorsque vous poussez la porte des « Lignes du temps », vous entrez dans mon domaine, mon a...